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L'HISTOIRE du RWANDA

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Comme son voisin, le Burundi, dont l'histoire présente bien des ressemblances, le Rwanda est l'un des rares pays d'Afrique dont les limites territoriales préexistaient à la colonisation. Situé dans la zone des Grands Lacs, il a été le théâtre des grandes migrations bantoues et se compose donc d'une population brassée avec les Twas (Pygmées) indigènes. Ce métissage a été si complet que l'on peut parler, dès le XVIIIe siècle, et sans doute avant, d'une civilisation commune, tous les habitants du Rwanda parlant la même langue: le kinyarwanda. Dans un temps reculé encore mal connu, la population s'est progressivement organisée autour de deux activités économiques majeures: l'élevage, rendu possible à grande échelle par la salubrité du climat sur les hauts plateaux, et l'agriculture, notamment dans les petites plantations bananières. La colonisation belge a ancré l'idée que la distinction entre les Tutsis et les Hutus était le résultat d'un clivage entre deux ethnies différentes: elle présentait les Hutus comme des Bantous, qu'elle jugeait inférieurs, et les Tutsis comme des populations descendant des Hamites, donc supérieures à ses yeux. En réalité, il s'agit plutôt de deux classes sociales. Dans leur majorité, les Tutsis étaient des propriétaires de bétail et les Hutus des agriculteurs. Mais la frontière était ténue car de nombreux Hutus pratiquaient l'élevage. Il existait surtout une hiérarchie entre une aristocratie, propriétaire du bétail ou des terres, et la population qui recevait des bœufs et du terrain en fermage. Dans les régions à majorité hutue, l'aristocratie comme la population étaient hutues. Dans les régions à majorité tutsie, elles étaient l'une comme l'autre tutsies. Mais dans les régions de métissage, l'aristocratie était tutsie et la population hutue, car posséder des biens élevait l'individu au rang de Tutsi, s'en départir le rendait hutu. La distinction ne reposait donc pas sur des critères ethniques. 
 
La formation du royaume du Rwanda a débuté au XVIe siècle, sous le roi Yuhi Gahima, et s'est poursuivie par à-coups au XVIIe siècle par incorporation successive de petites unités politiques. 
 
Le Rwanda précolonial La puissance du Rwanda s'est accrue avec la création d'armées frontalières par Cyilima Rujugira, vers le milieu du XVIIIe siècle, qui contrecarrèrent les tentatives d'expansion du Burundi et permirent la conquête du Gisaka (sud-est du pays), dans la première moitié du XIXe siècle, et des bords du lac Kivu. Les mwami du Rwanda réalisèrent un travail de centralisation politique, sous contrôle de la dynastie tutsie, avec une division en 21 provinces et l'institution d'un triple système de chefs nommés se contrôlant mutuellement: chef des terres rassemblant les prestations en produits agricoles et arbitrant les contestations foncières; chef du bétail réglementant le pâturage et percevant les redevances en produits animaux; chef des armées. L'essentiel du pouvoir était aux mains du clan royal, les Banyiginyas, et de quelques grands groupes tutsis. 
 
La colonisation allemande 
 
Pendant longtemps, le Rwanda demeura fermé aux étrangers: commerçants arabes et swahilis de la côte est et explorateurs européens, découragés par les rumeurs, l'évitaient. L'Autrichien Oscar Baumann fut le premier Européen à en franchir les frontières en 1892. En 1894 et 1897, le mwami (souverain) reçut à la cour successivement deux Allemands: von Goetzen et von Ramsay. En 1898, les Allemands installèrent le premier poste à Shangi, sur les rives du lac Kivu, déclenchant immédiatement la colère de Léopold II (roi des Belges) qui considérait y avoir établi sa domination privée. En 1899, les Allemands signèrent avec lui le traité d'Héligoland-Zanzibar qui permit à l'Allemagne d'étendre sa domination sur le Rwanda. Les frontières avec le Congo belge (l'actuelle République démocratique du Congo) furent définies en 1910. En 1899, affaibli par des querelles de succession, le mwami reconnut le protectorat allemand en échange d'une promesse de soutien. Peu à peu, l'Allemagne affirma sa suprématie en intervenant dans les affaires intérieures du royaume. La mise en valeur du territoire revint à la Deutsche Ostafrika Gesellschaft, qui incita les Swahilis à étendre leur commerce à la région et entreprit la construction d'une voie de chemin de fer reliant la région des Grands Lacs à la côte. Mais le déclenchement de la Première Guerre mondiale et l'invasion belge en 1916 brisèrent les espoirs coloniaux de l'Allemagne. 
 
La colonisation belge Le traité de paix signé à Versailles en 1919, et surtout une décision de la SDN, en 1922, firent du Rwanda un territoire sous mandat, confié à la Belgique. Officiellement, la Belgique pratiqua l'administration indirecte, en s'appuyant sur les institutions traditionnelles. En réalité, la Belgique intervint sans cesse davantage dans les affaires du Rwanda: sous le prétexte de renforcer les chefferies, elle les affaiblit. La présence belge se traduisit par la désacralisation de la royauté et le renforcement du pouvoir des Tutsis aux dépens des Hutus. Le colonisateur répandit la thèse que Hutus et Tutsis constituaient des ethnies distinctes, en lutte depuis des temps immémoriaux. Les missions catholiques, qui formaient les élites, donnèrent la priorité aux Tutsis et contribuèrent au renforcement du pouvoir tutsi. Les Belges développèrent l'agriculture aux dépens de l'élevage; ils introduisirent de nouvelles cultures comme le café. 
 
Après la Seconde Guerre mondiale, les Belges, face à la montée de l'anticolonialisme au sein de l'élite tutsie, changèrent brusquement de bord, dans les années 1950. Sous couvert d'installer une certaine justice sociale, ils encouragèrent les Hutus à se révolter contre ce qu'ils appelaient le «féodalisme» des Tutsis. Ils en voulaient pour preuve le quasi-monopole de cette «ethnie» dans les instances nationales, situation dont ils étaient eux-mêmes responsables. L'Église encouragea ce retournement en suspectant le nationalisme tutsi d'être influencé par le «communisme». En 1957, un groupe d'anciens séminaristes rédigea un Manifeste des Bahutus qui dénonçait le monopole politique, économique, social et culturel des Tutsis. Le clivage entre les deux communautés se durcit avec l'intervention de l'ONU, favorable au nationalisme indépendantiste des Tutsis. La mort subite du roi Mutara II, en 1959, et l'intronisation de son successeur, Kigéli V, sans l'accord de la Belgique, donnèrent le signal à un affrontement entre les deux communautés. Une partie des Tutsis fut massacrée, les autres s'enfuirent du pays. La Belgique encouragea la création de partis politiques, notamment le PARMEHUTU (Parti du mouvement pour l'émancipation hutue). En 1960, elle chargea son président, Grégoire Kayibanda, de former un gouvernement, alors que le pays sombrait dans la guerre civile. En 1961, celui-ci proclama la république, dont il devint le premier président. L'ONU organisa un référendum qui approuva l'abolition de la monarchie. Les élections législatives de 1961 confirmèrent le poids du PARMEHUTU. Le 1er  juillet 1962, le pays accéda à l'indépendance. 
 
Le Rwanda contemporain 
 
L'indépendance déclencha la «révolution sociale» hutue et entraîna l'exil de nombreux Tutsis; ces derniers, réfugiés dans les pays voisins lancèrent, sans succès, des offensives pour reprendre le pouvoir. Il s'ensuivit immédiatement de violents affrontements entre les deux communautés (1963-1964) et le massacre de nombreux Tutsis (20 000 environ). En 1973, le régime de Kayibanda, affaibli par des dissensions internes, se chercha un bouc émissaire: sous le prétexte de relancer la révolution hutue contre le féodalisme, il décréta une «chasse aux Tutsis» qui déclencha de gigantesques tueries. La même année, un coup d'État militaire renversa le régime et porta au pouvoir le général Juvénal Habyarimana. 
 
Celui-ci mit en place un pouvoir fort, appuyé sur les Hutus de sa région natale, le Nord, et sur le Mouvement révolutionnaire national pour le développement (MRND), érigé en parti unique. ll développa une politique raciste et extrémiste, avec un programme d'épuration ethnique: des quotas ethniques limitèrent l'accès des Tutsis aux écoles, aux emplois… Son régime reçut l'appui de la France et de la Belgique qui envoyèrent des troupes à plusieurs reprises pour le maintenir au pouvoir. Au clivage entre Hutus et Tutsis se substitua un clivage entre les partisans du régime, recrutés pour l'essentiel dans les rangs des Hutus extrémistes, et une opposition désormais constituée de Tutsis et de Hutus modérés. À l'extérieur, une opposition armée se forgea autour du FPR (Front patriotique rwandais), présent essentiellement en Ouganda et fort d'environ 10?000 «rebelles». Le FPR, souvent présenté à l'extérieur du pays comme un mouvement tutsi, est en réalité un mouvement multiethnique, au sein duquel les Tutsis sont certes majoritaires, mais dont le président est un Hutu. 
Le génocide 
 
En octobre 1990, le FPR franchit la frontière du Rwanda et envahit le nord du pays. Le président Habyarimana tenta de rétablir l'ordre en annonçant l'ouverture de son régime au multipartisme. Mais la guerre se poursuivit au point qu'en 1993 le FPR menaçait Kigali. En août 1993, les accords d'Arusha (Tanzanie) consacrèrent le partage du pouvoir entre l'opposition intérieure, élargie au FPR, et le parti du président. Appuyé par les ultras du MRND et par le CDR (Coalition pour la défense de la République), un autre parti extrémiste, le président Habyarimana multiplia les manœuvres pour ne pas appliquer ces accords. Le 6 avril 1994, dans un contexte d'incitation à la violence de la part des médias gouvernementaux, l'avion présidentiel fut abattu dans des conditions encore mal élucidées, provoquant la mort d'Habyarimana. Quelques heures après, les extrémistes hutus massacrèrent les Hutus de l'opposition et organisèrent le génocide des Tutsis. On estime le nombre de personnes tuées à plus de 500?000 (peut-être un million), en quelques mois de folie sanguinaire. Le FPR lança alors une offensive généralisée. Défaites après une courte résistance, les FAR (Forces armées rwandaises) entraînèrent dans leur fuite vers le Zaïre plusieurs centaines de milliers de Hutus. La France lança l'opération «Turquoise», un moment soupçonnée de vouloir rétablir l'ordre ancien. Dès le mois de juillet 1994, le FPR s'imposa et mit en place un gouvernement composé des partis d'opposition. En novembre 1994, le Conseil de sécurité de l'ONU a créé un Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPR) qui, siégeant en Tanzanie, doit juger les responsables des crimes contre l'humanité. La situation des très nombreux Hutus réfugiés dans le nord-est du Zaïre, devenu entre-temps la République démocratique du Congo, était alarmante. Le nouveau gouvernement de Kigali leur demanda de revenir, mais, selon toute vraisemblance, les responsables des massacres de 1994 les en empêchèrent. En septembre 1996, une minorité tutsie de la République démocratique du Congo attaqua ces camps de réfugiés. En novembre, l'ONU s'apprêtait à intervenir quand une partie des réfugiés regagna le Rwanda, alors qu'une autre s'enfonçait dans l'intérieur du pays, dans des conditions sanitaires épouvantables. 
 
En septembre 1998, hantés par la perspective d'un second génocide, les Tutsis du FPR au pouvoir à Kigali veulent créer dans l'est de la République démocratique du Congo une zone tampon qui les mettrait à l'abri des attaques des milices hutues réfugiées dans les provinces du Kivu. De son côté, le nouveau régime congolais de Kabila, se sentant pris en étau par les régimes tutsis en place au Rwanda, au Burundi et en Ouganda, semble avoir désormais repris le flambeau des extrémistes hutus chassés du pouvoir au Rwanda : accusant Kigali de vouloir créer un «empire tutsi», la radio congolaise appelle maintenant au meurtre de la diaspora tutsie (les Banyamulenges), celle-là même qui a aidé Kabila à parvenir au pouvoir, dans l'espoir que son régime mettrait un terme à l'intense collaboration qui unissait l'armée de Mobutu et les miliciens hutus responsables du génocide de 1994. 
 
Considéré comme le nouvel homme fort du pays, le général Kagamé qui cumulait déjà les fonctions de vice-président de la République et de ministre de la Défense, prend la direction du Front patriotique rwandais en février 1998. Parallèlement, il bénéficie du soutien du Kenya qui souhaite voir le Rwanda intégrer la Communauté économique d'Afrique de l'Est. Ainsi en mars 2000, le chef de l'État remet sa démission et charge le général-major, Paul Kagamé, d'assurer l'intérim au pouvoir. Cette démission est précédée, en février, par celle du Premier ministre hutu, Pierre-Célestin Rwigema, convaincu de corruption au terme d'une enquête parlementaire, et par la formation d'un nouveau gouvernement, dirigé par Bernard Makuza, excluant les principales personnalités hutues qui ont participé au gouvernement de «réconciliation nationale», mis en place après l'arrivée au pouvoir du FPR en 1994. Cette crise politique illustre une fois encore les difficultés rencontrées par les deux communautés à s'engager sur le chemin de la paix.

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